Extrait du livret du CD :
"E.T. est mon premier album. Il m'a fallu du temps, et deux versions, pour le finaliser - parce qu'il m'a fallu du
temps pour découvrir et canaliser les émotions fortes qui m'ont poussé à me lancer dans l'aventure incroyable de
la composition musicale.
E.T., le film, est pour moi le début de tout. Parce que je l'ai découvert à 15 ans, à l'âge où l'on s'égare dans ses
doutes et ses contradictions - et que cette rencontre m'a servi d'aiguillage vital."
Dans mon histoire musicale, tout commence par d'authentiques chocs personnels. Le premier concerne l'éveil
à la musique en elle-même, en ce 14 juillet 1990 où Jean Michel Jarre livre un concert monumental à la
Défense. J'ai 13 ans, j'écoute cette musique venue de nulle part couler de la radio et chaque note de chaque
morceau m'arrache des frissons. Je n'ai pas beaucoup dormi pendant le reste de la nuit !
En 1992, cela fait deux ans que je m'échine à apprendre la musique sur un petit clavier électronique (le
Casio MA-101, une merveille dotée d'une polyphonie 4 notes, d'une sortie mono, de sons psychédéliques et
dépourvue de séquenceur). Sur un petit magnétophone pourri, j'enregistre mes premières oeuvres - hélas
aujourd'hui perdues... Des grands moments de n'importe quoi vaguement mélodiques, où les notions de
temps musical et de rythme sont très largement remises en cause !
Puis survient le deuxième choc, cinématographique : E.T. l'Extra-Terrestre, le chef d'oeuvre de Steven
Spielberg, est diffusé pour la première fois en clair à la télévision. Comme toute ma famille, j'attends avec
curiosité - et aussi un peu de méfiance, parce que, bon, les films américains... - de découvrir ce fameux "plus
gros succès de l'histoire au cinéma", dont les affiches m'avaient plutôt effrayé lors de la sortie en salles du
film, en 1982 (j'avais cinq ans...)
Je suis fier d'affirmer qu'aujourd'hui, je ne m'en suis toujours pas remis. Quelle gifle ! Alors, c'était donc ça, le
cinéma... Une formidable machine à imaginer, à rendre vrais les rêves les plus improbables, un condensé
d'émotions capable de faire tourner la tête et de fouiller au plus intime du coeur. Leçon magistrale, donnée
par celui qui reste à mon sens le meilleur cinéaste du monde, capable de me toucher quoi qu'il filme. Maître
Spielberg, le prince des sages conteurs...
Là encore, la nuit suivante est agitée. Je suis littéralement possédé par les images du film, mais aussi par la
musique de John Williams, dont l'inégalable puissance évocatrice s'est gravée en moi à jamais. Le lendemain
matin, je compose le premier morceau de mon futur album, à l'instinct : c'est "E.T.5", l'un des rares titres qui
survivra (au prix de quelques arrangements indispensables) aux différentes versions du projet.
Quelques semaines plus tard, j'investis dans un clavier digne de ce nom, avec des sons intéressants, un
séquenceur costaud pour sa taille, et aussi huit pads permettant de jouer de la batterie en live : c'est le
Yamaha PSS-795. Il me permet d'élaborer davantage la musique qui bouillonne en moi, et d'enregistrer la
première version de l'album.
La perfection est loin d'être au rendez-vous ! Un excès d'enthousiasme, l'envie d'entendre très vite le
résultat, mes lacunes techniques de l'époque, aboutissent à un résultat approximatif. Tout en travaillant à
d'autres projets, je remets l'ouvrage sur le métier en 1993, pour obtenir le résultat final, la "version officielle"
de mon interprétation de E.T. Bien sûr, si je le réenregistrais aujourd'hui, il ne ressemblerait plus du tout à ce
qu'il est ! Manquant de maîtrise, parfois excessivement naïf, il se distingue néanmoins par son caractère
énergique et instinctif, fidèle autant que possible à l'esprit du film de Spielberg - et à ce que je devenais
alors, adolescent de quinze, seize ans, en quête de lui-même...